Nous avons eu la chance de pouvoir interviewer le pilote FPV Colas Feuillie alias Cola FPV ! Un pilote pas comme les autres, avec une expérience unique et surtout une spécialisation dans le monde du WingSuit.
Salut Colas, peux-tu te présenter afin que nos lecteurs sachent ce que tu fais dans la vie ?
Bonjour, je m’appelle Colas Feuillie et j’ai toujours vécu en montagne, à l’Alpe d’Huez plus précisément. Toute ma vie a été tournée vers le ski, l’alpinisme et vers le sport en général. J’ai connu une belle carrière en ski de compétition et en Skiercross jusqu’au plus haut niveau. J’ai aussi pratiqué le ski de pentes raides et freestyle pour mon plaisir. Voici le genre d’expédition que je faisais sur mon temps libre :
Malheureusement, le sport à outrance m’a amené à beaucoup trop abimer mon corps … 5 opérations au genou droit, fractures des 2 clavicules et de multiples vertèbres ont été cassées à force de repousser les limites…
Je suis alors devenu moniteur de ski, pourquoi pas !
Quand as-tu découvert le FPV, peux-tu nous en dire plus sur les différents projets que tu as réalisés avec des drones FPV ?
Lors de ma dernière convalescence, 6 mois dans un corset, j’ai découvert une vidéo de Mr Steele et j’ai alors appris l’existence des drones FPV. La pensée suivante m’est venue rapidement : et si je continuais à trouver des sensations extrêmes en cassant mon portefeuille plutôt que mon corps ?!!! je ne savais pas dans quoi je me lançais à l’époque, mais je ne regrette pas !!
J’ai alors compris qu’on pouvait faire voler une GoPro et que la seule limite était notre imagination. J’avais fait de la compétition chronométré toute ma vie, donc hors de question de faire de la race en drone. Je me suis acharné sur le freestyle, car c’était à mes yeux le seul moyen de réellement me préparer pour ensuite filmer des humains de prêt sans les mettre en danger. Il fallait automatiser les reflexes.
A l’époque il n’y avait pas de vidéo de kitesurf en FPV, mon frère étant un kitesurfer d’un niveau très correct, c’était mon premier gros projet de suivi de sujet. L’immense difficulté apportée par l’eau salée et le vent m’attirait beaucoup. J’aime bien quand ce n’est pas simple😊
J’ai aussi filmé pas mal de ski, plutôt par défaut car c’était facile autour de moi. Mais là encore je recherchais un peu de difficulté car trimbaler le matos FPV en plus du matos de sécurité montagne et shooter souvent dans le grand froid c’était plaisant et surtout un gros défi.
Comment as-tu rencontré le monde du WingSuit ? Qu’a-t-il de différent ?
Tout a commencé lorsque je m’entrainais dans un bando, et là un mec est arrivé pour sauter du haut du plus grand bâtiment. J’avais du mal à le croire, il me restait une lipo, je lui ai donc proposé de le filmer.
Le shoot a été correct ça nous a donné envie d’en faire plus. De là est né une grande amitié avec ZIP (Thomas Viethen) et on a commencé l’apprentissage en voyageant ensemble sur ses projets. Il m’a tout appris sur le monde du base jump et du speed flying (mini parapente) la quantité de choses à apprendre et à comprendre était énorme, l’essentiel pour moi était de toujours le filmer en sécurité.
Ce sont des sports où les athlètes n’ont pas le droit à l’erreur. Il n’ont qu’une seul chance. Donc je ne peux pas être un paramètre dangereux.
Etant éducateur sportif j’ai quand même l’habitude d’analyser les mouvements du corps dans l’action, et je pense que ça m’aide parfois à réagir pendant le pilotage. Je vis le moment avec l’athlète, je ne pense pas uniquement à le filmer avec mon drone racer.
Filmer du speed flying était facile car les vitesses ne sont pas excessives. Mais lorsqu’on s’est mis au base jump j’ai vite eu besoin de travailler sur mes drones pour accélérer. Il fallait que je puisse suivre pendant des chutes verticales de plus de 200m où ZIP peut atteindre des vitesses supérieures à 200km/h.
Le matériel a donc été une limite pendant un moment, puis j’ai commencé à pouvoir voler vers 180, 190km/h. Ça devenait plus intéressant, c’est à ce moment que ZIP m’a proposé de faire un essai avec son pote Vincent Cotte, un des meilleurs Wingsuit français.
On a essayé, c’était cool, on volait vraiment ensemble, mais de la même façon il y avait beaucoup à apprendre, tout se passe extrêmement vite à ces vitesses. Mes temps de réaction devaient être réduits au minimum pour toujours garder le sujet au milieu du cadre 😉
Le problème c’est que Vincent devait voler doucement pour ne pas me distancer, or dans le wingsuit la vitesse accroit sa sécurité car plus il va vite, plus sa wingsuit est pilotable. Il fallait donc clairement que j’accélère. Et je me suis donc mis à chercher comment accélérer…
J’ai été entouré par des gens fabuleux : Maxime Lecchi de Powerloop Racing a donner bcp de son temps libre pour me designer des châssis et m’aider dans ma quête, Jin Cheng de chez Xnova et Raphael Pirker de Team Black Sheep ont toujours répondu présent pour m’aider niveau matos. La limite des 200 km/h en cruising a été passée et la ça a commencé à être vraiment intéressant, Vincent pouvait commencer à accélérer, et on a pu faire de jolies choses ensemble.
Mais ce qui ressortait le plus de cette aventure c’était vraiment le plaisir qu’on avait à partager sa discipline, à passer des moments ensemble en montagne dans des endroits merveilleux, et à toujours essayer de faire mieux. Seulement, 200km/h n’était toujours pas suffisant, car si je veux vraiment filmer son sport au plus haut niveau, j’aurais plutôt besoin d’atteindre 280km/h…Mon développement continu sans cesse, et aujourd’hui je peux cruiser à 220km/h pendant 1 minute 30 environ, avec des pointes a 240km/h… C’est mieux, ça augmente, mais ce n’est toujours pas suffisant !!
La différence avec d’autres sport, c’est que filmer du wingsuit n’est jamais simple, c’est presque toujours du long range, ça demande très souvent de la marche d’approche en montagne, et si on a 2 minutes de bonnes images après une journée de 12h c’est un bon résultat !! Il ne faut jamais avoir la flemme, j’étudie les cartes pour chaque saut pour trouver mon placement et parfois je me mets des sacrées missions randos hors sentiers. Ça fait partie de l’extrême du truc, si après ça le plan est réussi, on est encore plus content 😉.
C’est une question attendue par nos lecteurs, quel matériel utilises-tu ?
Haha !! Je reçois des DM avec cette question au minimum une fois par jour…. Et j’avoue que je ne dévoile jamais toutes mes ficelles. En gros dans les descriptions de mes vidéos Youtube vous pouvez trouver le setup de mon avant dernier proto… Mais jamais le dernier bébé. Je suis bien désolé si cela me donne une image de gros égoïste ! Voici tout de même ma config précédente :
- Châssis : 6 inch CHASER from POWERLOOP RACING
- Contrôleur de vol: HGLRC ZEUS F722
- ESC : HGLRC 60A 4in1
- Hélices : APC 6×6
- Moteurs : XNOVA 2208 1500 KV
- Caméra FPV : Foxxer PREDATOR v5
- Caméra HD : Gopro HERO 8 black
- Récepteur : TBS crossfire NANO DIVERSITY
- Emetteur VTX : TBS Unify Pro HV32
- Antenne : TBS Triumph Pro
- Batterie LiPo : CNHL 6s 1800mAh 120
- Lunettes : FatShark Dominator HDO 2
- Récepteur vidéo : TBS Fusion
- Antennes : VAS Ethix Crosshair Extreme (RHCP) 5.8GHZ + VAS ETHIX MAD MUSHROOM V2 (RHCP) 5.8GHZ
- Ecouteur : Fait maison, mais nous vous conseillons cet écouteur Mr Steele par Ethix.
- Radiocommande : Taranis X9D+ Special edition MR STEELE
- Emetteur radiocommande : TBS Crossfire
Mais ça fait bientôt 1 an et demi que je ne vis que pour ça, et je trouverai ça un peut facile de donner la recette… Surtout que je n’ai toujours pas trouvé la solution ultime ! Je me dis qu’avec mon background de sportif où je ne comprenais rien à l’électronique, il y a surement plein de pilote FPV avec des bagages théoriques bien supérieurs qui pourraient facilement arriver à mes résultats et même à mieux ! En gros si j’y arrive, c’est que tout le monde peut le faire je pense ! Il suffit d’être motivé !!
De ce que je peux observer, bien sûr le matos est une part importante d’un plan réussi, mais aussi, à ces vitesses, la moindre erreur de pilotage te met en retard et tu ne pourras pas rattraper !! Je passe le plus clair de mon temps à faire des tests, analyser les résultats, construire des protos, et quand j’ai l’impression que je tiens quelque chose, j’appelle Vincent et on voit si on peut aller plus vite 😉
Quels conseils peux-tu donner à ceux qui, comme toi, souhaitent filmer des sportifs de l’extrême ? (matériel, façon de travailler, …)
Question très intéressante ! La PREMIERE chose est de RESPECTER l’athlète ! C’est insupportable de voir le nombre de caméramen qui ne pensent pas au performeur, qui ne pensent qu’à leur plan… A savoir qu’un athlète performera mieux dans une ambiance très positive, et vous n’êtes là que pour le filmer !! Sans lui, pas de plan ! Alors qu’il y a plein de cameramen ! Pour avoir connu ce milieu, c’est beaucoup plus dur de devenir athlète de haut niveau que pilote de fpv… Donc à mon avis, rester humble et laisser l’athlète décider est primordial. On est là pour capturer sa performance de la meilleure façon, c’est tout ! C’est lui qui prend les risques, qui met son corps sur la ligne, nous c’est juste du carbone et des billets. Si l’athlète dit : « pas aujourd’hui » et bien c’est comme ca, c’est indiscutable.
L’autre point important pour moi c’est la sécurité : On a pas le droit de toucher l’athlète et/ou son matériel. Souvent les athlètes ne se rendent pas compte du danger que représentent nos drones, mais à mon avis le danger est bien réel. A vous de garder la tête froide qand le sportif vous dit « fais ce que tu veux », car bien sûr ces mecs n’ont peur de rien donc surtout pas de votre drone. Dans beaucoup de cas, un impact ne sera pas mortel pour le sujet, mais dans certains sports on pourrait clairement arriver à cette désastreuse conséquence.
Il y a bien assez de mecs qui survolent des aéroports et font créer des lois qui nous limitent de plus en plus, ne rajoutons pas d’autres raisons de créer des interdictions ! Clairement il y a beaucoup de vidéos de base jump partout maintenant, certaines sont supers, c’est clair !! Mais sont-elles toutes safe ? En tout cas je préfère ne pas avoir le plan de l’année mais n’avoir jamais mis mon sujet en danger. Changez de carte mémoire à chaque lipo, et soyez toujours prêt à désarmer avant l’impact… A chaque fois que je décolle je suis prêt à ne pas revoir mon drone mais à revoir mon pote 😉
Dernière chose : ayez une confiance aveugle en votre setup. Testez le et retestez le encore. En tant que pilote FPV, professionnel ou pas, nous n’avons pas le droit à l’erreur !
Plutôt numérique ou analogique et pourquoi ?
Analogique !!! haha 😉
On pourrait parler du monopole DJI, du prix conséquent de leur matos, du poids et de la place que ça prend…
Mais je pense que l’argument numéro 1 c’est la façon dont l’image se dégrade. On discernera toujours quelque chose en analogique le temps que le signal revienne, pas question pour moi d’envisager un freeze de frame alors que je suis à 2 mètres de mon pote à plus de 200km/h. Sécurité avant tout ! J’avoue qu’avec le bon setup en analogique, je n’ai jamais ressenti le besoin de mieux voir, et mes builds sont loin d’avoir la place de recevoir les gros boitiers DJI haha 😊 J’ai une grande confiance dans mon matos et mon signal analogique, ça me convient parfaitement.
Pour toi, quelles sont les innovations qui vont arriver prochainement dans le monde du FPV ? Et celles que tu aimerais voir arriver ?
Aucune idée de ce qui va arriver prochainement, j’essaye déjà de suivre le rythme de ce qui sort actuellement 😉 mais ce qui m’arrangerais vraiment, ce serait des ESC encore plus performants, avec des lipos de plus grandes capacités pour la même taille et un plus grand taux de décharge (je sais je rêve). Mais clairement c’est là où j’aimerais voir les améliorations. Si on pouvait avoir plus de patate ca serait top ! Malheureusement ce n’est pas la direction qu’on prend, on protège les hélices, on vol doucement, pourquoi pas !! Heureusement le monde de l’électronique est assez vaste pour que tout le monde y trouve son bonheur !!
Quels sont tes futurs projets FPV ?
Je me sens si bien quand je vol à fond… Je souhaite vraiment me spécialiser dans la prise d’images à très haute vitesse. J’avoue avoir sauté l’étape des Cinelifter x8 car je n’aurais pas d’applications à ces vitesses. J’en veux plus, donc mes deux quêtes actuelles sont : faire cruiser une GoPro à plus de 250km/h et une RED à 220km/h, les développements semblent très prometteurs et sont en bonnes voies ! Et si on y arrive alors on essayera de faire toujours plus 😉
Merci beaucoup pour cette interview, portez vous bien, et surtout volez SAFE !
COLA FPV.
En sécurité ? Donc le drone est toujours à vue du pilote car pas de commentaire sur le spotteur ? Sauf si tout cela ne se fait pas en France… Comme le tournage à Annecy par exemple…
Bonjour, Merci d’attirer notre attention là dessus, en effet quelle erreur de ne pas avoir mentionné le spotteur ! Colas est toujours accompagné d’un spotteur diplômé en règle, en plus de tous les gens qui regardent les parachutistes sauter. C’est en effet très rare qu’il pratique cette activité en France mais cela n’empêche pas ! Pour ce qui est du tournage à Annecy, Colas vient de me confirmer que le seul tournage à Annecy auquel il a participé, il y était justement en qualité de spotteur. Nous nous sommes plus attardés ici sur la performance technique de ses réalisations. Merci pour votre commentaire,… Lire la suite »
Pouvez-vous me rappeler les conditions de vols en fpv en France ? Car du chasing de wingsuit me semble dépasser la porte de vue du spotteur…
Bravo pour cet article très intéressant et bravo à Cola pour ses vidéos impressionnantes , ça fait plaisir de voir des gens partager leur passion et leur expérience (et pas des gens qui font brûler des patates … ) . Je suis étonné de la config en 6″ , je pensais que des hélices plus grandes permettaient de voler plus vite pendant plus longtemps , genre 7″ où plus .